L'homme au masque de cire.

© DC Comics - Sagédition 1980 
(Batman poche n°25)

Une case mémorable s'il en est : l'ouverture de cet épisode de Batman par Marshall Rogers (encrage de Dick Giordano).
La case circulaire reprend le cliffhanger de l'épisode précédent (on appelle ainsi une situation périlleuse dans laquelle se trouve le héros en fin d'épisode, ici, Batman est à terre, menacé par le nouveau Face d'Argile) est elle est dominée par la silhouette du héros encapé : pas d'erreur, il s'agit bien d'une aventure dont Batman est le héros.
Cette splash-page (c'est une case qui occupe la totalité de la planche) alliait à mes yeux un élément suranné (Batman, ringard avec sa cape par rapport aux héros Marvel comme Spiderman ou Daredevil) et la mise en page dynamique et novatrice.
L'histoire aussi est mémorable car elle introduit un nouveau vilain, Preston Payne, le second Face d'Argile.

© DC Comics - Sagédition 1980
(Où l'on constate que Tête d'Oeuf © Marvel fait des extras chez le diabolique concurrent - Si, là, au centre !)

Preston Payne souffre d'une difformité physique qui le met au ban de la société (on songe au cas de John Merrick, dit "Elephant Man".) Les différents spécialistes qu'il rencontre sont impuissants à trouver un remède. Il décide alors de contacter le premier Face d'Argile, un vilain capable de modeler son visage à volonté, lequel accepte de lui donner un échantillon de son sang. Grâce à cet échantillon, Preston met au point un sérum qui lui permet de se modeler un corps parfait. Hélas ! L'effet ne dure pas. Preston se liquéfie et il est habité d'une fièvre qui le dévore, à moins qu'il ne la communique à quelqu'un d'autre. Son contact devient alors mortel car il transforme sa victime en un amas organique informe.

© DC Comics - Sagédition 1980 
Dans l'édition française, le visage de Preston Payne est masqué par un cache noir que de temps à autre le retoucheur oublie de mettre (pour des plans éloignés).
Ce dramatique récit est narré par Preston lui-même à sa compagne...

© DC Comics - Sagédition 1980 
Qui s'avère être un mannequin  de cire !

De son côté, Batman broie du noir (et du voyou par la même occasion). En effet, sa compagne, Silver, s'est détournée de lui à cause de son activité de justicier nocturne. Batman passe même ses nerfs sur les voyous qu'il attrape et les conséquences seraient funestes sans l'opportune intervention de la police.

© DC Comics - Sagédition 1980 
La case centrale constitue une mise en abyme dans la mesure où elle reproduit toute une planche à l'échelle d'une case. 
Les différents plans sur Batman et les policiers soulignent la dilatation du temps à ce moment-là. A la fois interminable (multiplication de plan fixes) et bref (l'hésitation ne dure que l'espace d'une vignette avant que le justicier, revenu à la raison, n'abandonne ses proies à la police.)
Le récit met donc en parallèle les parcours croisés (*) du justicier esseulé, abandonné, qui n'a plus que sa fonction à laquelle se raccrocher pour trouver un sens à son existence, et du damné, qui, lui, a trouvé son équilibre, dans la folie, mais cherche désespérément à échapper à sa condition.

(*) Une formulation qui se discute sur le plan strict de la géométrie, j'en conviens.

Sollicité par Gordon qui vient de découvrir les restes d'une victime de Face d'Argile, le justicier va traquer le criminel jusqu'à l'ultime confrontation.

© DC Comics - Sagédition 1980 
 On observe dans la première et la cinquième vignettes le tramage maladroit du retoucheur qui cherche à dissimiler l'emplacement originel des bulles de la version américaine.
Comme l'encombrement du texte français est habituellement plus important que celui du texte anglais, on peut légitimement supposer que les coupes dans le texte original ont été drastiques !

Laquelle confrontation se déroule dans le musée de cire désaffecté où s'est réfugié Face d'Argile. 
Au cours de l'affrontement, une bougie met le feu aux rideaux et le bâtiment entier s'enflamme. 
Face d'Argile échappe alors à ses gardiens et se précipite dans le brasier dans l'espoir de sauver sa compagne de cire.
Une fin mélodramatique digne du Fantôme de l'Opéra ou de l'Homme au Masque de Cire.

 © DC Comics - Panini comics - 2005


Alan Moore imagine une suite au récit de Len Wein. 
Face d'Argile a survécu à l'incendie mais il n'a pu sauver Hélène.
Il la retrouve dans un grand magasin où il s'installe.
Très vite, le doute s'insinue en lui lorsqu'elle est déplacée du rayon robes du soir au rayon lingerie.
Ses soupçons le conduisent à éliminer un veilleur de nuit qu'il prend pour un rival.
Hélène est devenue une femme volage.
Lorsqu'on retrouve les restes du veilleur de nuit, Batman est alerté et revient affronter Face d'Argile.


© DC Comics - Panini - 2005
Lors du combat, Batman réalise l'état de confusion mentale dans lequel se trouve son adversaire.
Celui-ci est persuadé qu'Hélène se joue de ses sentiments.
Batman obtient qu'il soit interné à Arkham , l'asile psychiatrique de la ville de Gotham, en compagnie du mannequin, espérant que ce sera meilleur pour son équilibre.

© DC Comics - Panini Comics - 2005
Il n'en est rien. Désormais le lien est rompu au sein du couple et Face d'Argile envisage même de se débarrasser de son encombrante moitié... 

Moore complète le récit de Len Wein en apportant une conclusion cynique et désabusée à la relation entre Face d'Argile et Hélène. Une rupture de ton radicale par rapport à l'histoire initiale : après l'élan amoureux et romantique du premier volet vient le moment de la désillusion puis de la rancœur.

Commentaires

  1. Marshall Rogers est l'un de mes tous meilleurs dessinateurs préférés !

    La puissance de son trait, son découpage, ses expérimentations en font l'un des meilleurs artistes de Batman.

    Bastien Ayala.

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Langue de P...